mardi 7 avril 2009

De la castration de l’homo-québécus

Je vous conte une anecdote vécue par une amie dernièrement. La fille, appelons-la Zoé, sort prendre un verre et manger une bouchée avec des amies un vendredi soir. La soirée finit trop tôt à son goût puisque les filles, dont le lit les appelait, déclarent forfait vers 23h. Zoé, toutefois, sent en elle vibrer l’appel des shooters de tequila. Et croyez-moi, lorsque cet appel se fait entendre, mon amie doit y répondre puisque c’est quelque chose d’assez rare (Zoé n’étant pas ce qu’on appelle une « party animal »).

En route vers chez-elle et après quelques messages-texte à un hypothétique compagnon de boisson, elle s’arrête dans un établissement pour étancher sa soif tenace. L’endroit est bondé d’hommes (ratio hommes/femmes d’environ 5/1) de son âge (fin vingtaine) offrant un potentiel quand même intéressant. Zoé s’attable au bar seule –chose qu’elle n’avait auparavant jamais faite- et commande trois tequilas, qui, l’espère-t-elle, noieront la petite voix qui crie « party » sous son plexus solaire. Zyeutant de temps à autre son cellulaire pour voir si la proposition de l’autre finira par se concrétiser, elle se dit qu’à la quantité d’hommes en rut dans la place, il y en a bien un qui viendra lui faire jasette. Comprenez-moi bien, l’endroit n’est pas particulièrement sophistiqué et on parle ici d’un débit de boisson à peine plus classe que les tavernes qui affichent candidement « bienvenue aux dames ». D’ailleurs, accrochée au-dessus du bar, la fausse tête d’orignal dont le panache sert de patère à de nombreux soutiens-gorge de toutes les couleurs nous le rappelle.

Comme la soirée est encore jeune, Zoé , après une petite pause suivant les trois tequilas, s’attaque à un verre de bière en fût. Durant tout ce temps, les hommes vont et viennent autour d’elle pour commander leurs consommations au bar. Je tiens maintenant à vous décrire mon amie. Elle est jolie (pour ne pas dire un pétard), bien proportionnée et possède quelques rondeurs harmonieuses situées aux bons endroits sur son corps. Bref, elle est loin d’être un pichou. Pourtant, durant l’heure (60 minutes!) où elle a été attablée au bar, aucun gars ne lui a adressé la parole. Pas un « Bonjour », aucun « Comment ça va? », pas même un « S’cuse… ».

Pendant une heure, une fille souriante et jolie est restée seule au bar sans qu’aucun gars ne lui adresse la parole. Merde ! Où est-ce que les hommes sont rendus ! Suis-je la seule à penser que cette histoire dénote un grand malaise dans notre société ? Les gars n’osent plus approcher les filles. Est-ce la faute des femmes qui ont trop souvent éconduit cavalièrement les hommes qui essayaient de les aborder ? Est-ce que les hommes sont rendus à ce point pissous ? Ou la situation paraissait-elle trop louche pour qu’un gars normal ose aborder une jolie fille normale seule un vendredi soir ?

Ces questions me trottent dans la tête et je n’ai malheureusement pas de réponse. Quelqu’un peut-il m’aider à éclairer ma lanterne ? Ai-je raison d’être habitée en ce moment par un diffus sentiment de découragement face à l’homo-québécus ?

* Pour votre information, après l’heure passée au bar sans avoir été abordée par aucun gars, même pas un agrès, Zoé s’en est retournée chez elle où elle s’est fait une dernière tequila avant d’aller se coucher.