lundi 17 mai 2010

Salut les vrais !

Montréal, le jeudi 13 mai 2010





Monsieur Goeff Molson
Vice-Président, Marketing
Molson Coors Canada
1555, Notre-Dame Est
Montréal, Québec
H2L 2R5


Monsieur Molson,

Je vous écris puisque sur le site Internet de Molson, votre profil mentionne que « … Geoff s’est donné comme mission de s’impliquer davantage dans l’entreprise ». Fort bien, j’ai donc cru que vous seriez la meilleure personne à qui communiquer une expérience vécue récemment en lien avec votre compagnie.

Je me suis rendue avec trois autres personnes au Centre Bell le mercredi 12 mai dernier pour la présentation sur écran géant du 7e match entre nos (plutôt « vos ») Canadiens et les Pingouins de Pittsburgh. La dernière fois que j’avais mis les pieds dans cet amphithéâtre remontait à janvier 2008 pour un concert de musique. À cette époque, vous n’étiez pas encore propriétaire du Centre Bell et Evenko.

L’idée de présenter le match au Centre Bell sur écran géant en l’absence des Glorieux me semblait géniale. Les médias promettaient un événement haut en couleurs même si le club ne jouait pas à domicile.

Les membres de notre groupe (mon amoureux, une amie, son conjoint et moi-même) travaillent tous au Centre-ville dans des édifices différents. En prévision de nous rendre ensemble à l’événement, nous nous sommes donné rendez-vous après le travail près du Centre Bell dans un endroit de restauration rapide (McDonald’s, pour ne pas le nommer). Comme il était annoncé que l’événement commencerait dès 18h avec « DJ, animation et prix de présence », nous étions pressés d'arriver au Centre Bell. Nous n'avons donc pas pris le temps de manger les chaussons aux pommes achetés chez McDo et les avons placés dans mon sac à main pour consommation plus tard en soirée (durant l'événement ou de retour à la maison).

Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’en fouillant mon sac à main à l’entrée du Centre Bell, une préposée a exigé que je jette à la poubelle non seulement la bouteille d’eau que je traîne toujours avec moi mais aussi les chaussons que nous n’avions pas encore eu le temps de manger. Ce geste m’a dégoûté pour plusieurs raisons. Au départ, j’ai pensé que la fouille était liée à des raisons de sécurité, chose qui aurait été tout à fait normale. Lorsqu’on a plutôt exigé que nous jetions à la poubelle toute boisson (de l’eau !) et nourriture (des chaussons au pommes de chez McDo !), j’ai réalisé que ce que je croyais être une norme de sécurité est en fait un geste des plus mercantiles : on exige que nous ne consommions au Centre Bell que les produits vendus dans l’établissement.

Votre façon de faire est non seulement aberrante mais surtout irrespectueuse envers vos clients et supporteurs des Canadiens. Ces mêmes gens qui, gonflés à bloc de joie et d’espoir, se rendent au Centre Bell assister à un match (qui, lorsque disputé à domicile, peut coûter jusqu’à 500 $ par personne). Ces mêmes gens qui profiteront sûrement de leur passage dans l’amphithéâtre pour s’acheter quelques souvenirs (gilets officiels, casquettes, stylos, autocollants, tatouages temporaires, etc.). Ces gens pour qui une soirée au Centre Bell ne serait pas complète sans avoir mangé quelques hots-dogs (5 $ chacun) et bu une ou deux bières Molson (précieux houblon à 10 $ le verre).

Le geste posé par la préposée aux fouilles est sans équivoque : aucun client du Centre Bell ne peut consommer des produits achetés ailleurs afin, manifestement, d’éviter que la compagnie Molson ne perde quelques précieux dollars. Mais, Monsieur Molson, sachez que les dollars que vous espérez avoir sauvés avec les chaussons jetés à la poubelle mercredi dernier ne sont rien comparés à ceux que je sauverai à l’avenir avec les produits Molson et le club des Canadiens de Montréal. Avant mercredi, je rêvais de voir un match de la Sainte Flanelle au Centre Bell. J'ai maintenant changé mon fusil d'épaule. D’ailleurs, je compte aussi éviter le Centre Bell pour des représentations autres que sportives (concerts musicaux, spectacles pour enfants, etc). Je ne me procurerai pas le t-shirt officiel que je comptais acheter pour célébrer la gloire des Habs ni même le fanion à mettre sur la voiture. Mais surtout, sachez Monsieur Molson, que lorsque nous regarderons les matchs de hockey simplement à la télévision dans notre salon, mon conjoint, mes amis et moi boirons du vin ou de la boisson gazeuse. Et lorsque nous irons dans des bars dotés d’écrans géants, nous choisirons des établissements qui ne servent que des produits concurrents à Molson.

Mon capital de sympathie envers vous et votre compagnie est sérieusement entaché depuis mercredi dernier. Les petits gestes et les détails peuvent faire une différence en affaires comme ailleurs. Je me souviendrai longtemps de cet épisode au Centre Bell.

Cheers !

jeudi 28 janvier 2010

L'indécence

Ce qui se passe à Haïti me dégoûte complètement. Ces ruines, ces morts, ces blessés, ces amputés, tout ça est d’une tristesse sans nom. L’odieux dans tout ça, c’est l’empressement des bons journalistes à nous montrer ça de près, de très près et en odorama si c’était possible. Vite, il faut dépêcher les médias dans cette pauvre terre encore une fois dévastée par une tragédie. Raconter et montrer l’horreur. Parce qu’on sait tous que le bon peuple occidental, la tragédie, il ne veut pas la savoir, il veut la woèrr !

Avons-nous besoin d'être les voyeurs du drame de cette dame qui vient de se faire amputer la jambe ? Manise répond dignement aux questions de ce journaliste blanc venu témoigner de l’horreur. Elle pense au futur, à quel point sa vie sera changée dans ce pays déjà hypothéqué avant la catastrophe.

Je me sens mal quand je vois ça. Le malaise ne vient pas tant de mon impuissance mais de ce que j’appelle l’impérialisme de l’information. Les médias du monde entier se sont jetés sur Haïti comme la misère sur le pauvre monde, littéralement. Tous ces journalistes étrangers blancs qui sont à Haïti supposément pour communiquer le drame, que font-ils là sinon que de profiter d’une tragédie sans nom pour se faire du crédit ? « Oh, j’étais l’un des premiers journalistes canadiens à arriver à Port-au-Prince en janvier 2010 », « Moi, monsieur, j’ai vu l’horreur en direct et je l’ai montrée à la face du monde ». Ah oui, fort bien. Mais moi, la question que je me pose quand je vois Céline Galipeau, Émanuelle Latraverse, Jean-François Bélanger, Richard Latendresse, Félix Séguin et compagnie, est la suivante : où sont-ils logés, comment sont-ils nourris dans cet enfer qu’ils nous montrent en direct à tous les jours ? Manifestement, ils ne dorment pas dans les tentes improvisées faites de quelques pieux et morceaux de draps. Ils sont bien nourris et bien logés pour pouvoir chaque jour nous envoyer les images et les témoignages de ceux qui sont blessés, malades et sans logis depuis la catasptrophe.

Haïti est une terre brisée et damnée. Après les pilleurs espagnol et français, après un impérialisme politique qui a rongé les assises de cette terre de soleil, les tragédies naturelles des dernières années ont amené une autre tare : l’impérialisme dont font maintenant preuve les médias du monde entier.

Triste destin que celui de ce pays.